Un nouveau gouvernement libéral ne signifie pas automatiquement l'annulation d'un an et demi de changements politiques anti-LGBTQ2S+.
Après 16 mois de lutte contre les efforts des conservateurs provinciaux visant à réduire les protections pour les jeunes transgenres, la victoire des libéraux aux élections du 21 octobre au Nouveau-Brunswick pourrait apporter un peu de soulagement aux activistes.
« Nous sommes épuisés », déclare Nicki Lyons-MacFarlane, militante d'Imprint Youth, un organisme communautaire au service des enfants et des jeunes adultes de Fredericton. « Cela fait un an et demi que nous nous battons pour les droits de nos enfants homosexuels et transgenres.
Tasia Alexopoulos, porte-parole de la Coalition pour le droit à l'avortement au Canada, basée au Nouveau-Brunswick, se bat depuis plus de dix ans pour protéger les droits reproductifs dans cette province. Selon elle, les deux luttes sont étroitement liées.
« Ils sont très liés », dit-elle. « Il s'agit d'une période très anxiogène pour les enfants qui font l'expérience du genre d'une manière différente et qui ont peur.
C'est au Nouveau-Brunswick qu'a débuté la dernière vague d'attaques législatives contre les enfants queer et trans, lorsque l'ancien premier ministre conservateur Blaine Higgs a entamé le processus de révision de la politique provinciale en matière d'éducation afin de supprimer les protections pour ces élèves. Alors que le Nouveau-Brunswick a supprimé les protections existantes, les gouvernements conservateurs et de droite de la Saskatchewan et de l 'Alberta lui ont emboîté le pas en introduisant de nouvelles restrictions aux droits des jeunes de sexe différent, le premier ministre de l'Alberta s'attaquant également à l'accès des femmes transgenres aux sports et aux soins de santé pour les jeunes de sexe différent. Le Québec est en train de revoir ses politiques (sans que les membres de la communauté trans ou LGBTQ2S+ ne soient impliqués dans ce processus) et le gouvernement de l'Ontario a manifesté son soutien aux politiques de la Saskatchewan et de l'Alberta, tout en s'abstenant de s'engager à les suivre. La question est également devenue un sujet brûlant lors des élections en Colombie-Britannique, où les conservateurs provinciaux ont menacé de supprimer les ressources pédagogiques sur l'orientation sexuelle et l'identité de genre (SOGI 123) mises à la disposition des enseignants de la province.
(...) Ils se souviennent d'être rentrés du travail un jour d'août et d'avoir trouvé dans leur boîte aux lettres des prospectus anti-trans, qui faisaient partie d'une campagne menée par Campaign Life Coalition, au cours de laquelle deux employés de Postes Canada ont été suspendus pour avoir refusé de livrer le matériel de la coalition.
« C'était comme un coup de poing dans le ventre », se souvient Mme Lyons-MacFarlane. » Putain de merde, c'est bien réel, ça se passe vraiment ici ?
Ce qui les a frappés encore plus durement, disent-ils, c'est la réaction des enfants transgenres avec lesquels ils travaillent : certains enfants ont été profondément traumatisés de trouver les tracts sur le pas de leur porte en rentrant de l'école. Certains enfants et certaines familles ont été tellement choqués par la campagne qu'ils ont détruit le matériel offensant dans des feux de joie communautaires.
Ce n'est pas une coïncidence si les prospectus ont été distribués par Campaign Life Coalition ; cette organisation canadienne de droite est surtout connue pour son travail contre l'avortement - or l'avortement et l'identité de genre sont tous deux des questions d'autonomie corporelle. Au fur et à mesure que les protections des droits humains et le soutien aux personnes transgenres et queer ont été intégrés dans la législation au cours des quatre dernières décennies, les groupes de défense d'extrême droite et conservateurs ont étendu leur champ d'action du contrôle du corps des femmes par le biais de campagnes contre l'avortement et les droits reproductifs, au contrôle de la sexualité et de l'identité de genre de manière plus générale.
Selon Alexopoulos, les tracts ont fait prendre conscience à de nombreux militants de l'ampleur de leur combat.
(...) Un journaliste m'a demandé : « Qu'en est-il des avortements tardifs à neuf mois ? J'ai répondu que cela n'arrivait pas. Mais il s'agit d'une fausse information qui circule vraiment en ce moment, et nous pouvons la relier directement à ce qui se passe aux États-Unis ».
L'incapacité des médias américains à contrer efficacement la désinformation signifie qu'elle se propage également au Canada, prévient-elle. Une fois qu'elle circule ici, elle enhardit la droite dans ce pays à répandre davantage de désinformation et à étendre son programme politique.
La victoire des libéraux a modifié le paysage politique de la province, mais il est trop tôt pour dire dans quelle mesure. Le parti a fait de vagues promesses d' élargir l'accès à l'avortement et de revenir sur les changements apportés aux politiques éducatives concernant les enfants de sexe différent dans les écoles. Alexopoulos n'a pas été impressionné par le manque d'engagements spécifiques du parti.
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