Le bilan actuel concernant la situation de la répression de l’homosexualité en Tunisie est catastrophique. L’Association SHAMS a comptabilisé en 2017 plus de 71 arrestations pour homosexualité. Les condamnations varient entre 3 mois et 3 ans de prison fermes. Évoquons actuellement un cas emblématique qui démontre l’ampleur de la répression : celui d’un jeune infirmier de 25 ans qui a été victime d’un viol chez lui et, bien que victime, le juge d’instruction a décidé de le traduire devant la Cour d’Assises avec son violeur, le premier sous le chef d’inculpation de sodomie, le second sous le chef d’inculpation de viol.
Il est à noter que la répression n’est pas seulement judiciaire, mais elle est aussi familiale et sociétale. SHAMS a dénombré un nombre important de jeunes homosexuels expulsés par leur famille qui se sont retrouvés dans la rue sans ressources et sans travail, souvent obligés à se prostituer. De même que le nombre d’agressions d’homosexuels dans la rue est aussi en augmentation. Vu qu’ils sont considérés comme des criminels, ils n’osent pas porter plainte devant la police de peur d’être accusés d’homosexualité et surtout de devoir subir le test anal. Nous ne connaissons pas la date du commencement de la pratique des tests anaux, mais nous supposons que cela a commencé à être appliqué en 1913, date de l’instauration de l’article 230 du Code pénal qui criminalise l’homosexualité (sous le protectorat français). Il a été inventé par un médecin français au 19e siècle et continue d’être enseigné jusqu’à maintenant dans les facultés de médecine en Tunisie bien que des études scientifiques ont prouvé formellement que c’est du charlatanisme et qu’aucun médecin ne peut prouver formellement à travers ce test qu’une personne soit habituée à la pénétration anale.
Des témoignages ont été recueillis par SHAMS, ils sont consultables en visionnant le documentaire qui s’appelle « Au pays de la démocratie naissante ». Par ailleurs, le refus d’obtempérer est aussi souvent considéré par la justice comme une présomption de culpabilité. SHAMS possède des jugements qui ont motivé la condamnation des accusés par le refus de ces derniers de subir le test anal.
Bien que le gouvernement tunisien a promis de cesser le test anal, ses promesses sont restées jusqu’à maintenant lettre morte. Elles sont seulement un moyen d’apaiser les pressions internationales surtout celle du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU pour arrêter ces formes de tortures, mais nous avons l’espoir que ces promesses pourraient être tenues suite à l’instauration de la Commission des Libertés Individuelles et de l’Égalité par le président de la République. Nous avons des échos qui disent que cette commission va recommander au parlement d’interdire définitivement le test anal. La seule amélioration visible à court terme c’est la possibilité d’interdire ce test par le parlement, en ce qui concerne l’abolition de l’article 230 du Code pénal qui criminalise l’homosexualité, cela n’est pas envisageable actuellement et même à terme sauf décision de la Cour Constitutionnelle qui n’a pas été encore instaurée. Elle pourrait alors abolir cet article et le déclarer anticonstitutionnel vu qu’il est en contradiction avec les articles 21, 23 et 24 de la Constitution tunisienne qui interdisent toutes formes de discrimination, protègent la vie privée et le secret des correspondances et des données personnelles ainsi que l’inviolabilité du domicile.
Mounir Baatour Président de SHAMS
Source : page FB de Shams
2018-02-27
|