Le jeu trouble de la Côte d’Ivoire

Envoyé par Catou en date du 20 novembre 2016 à 09h38 en réponse à Première condamnation pour homosexualité en Côte D'Ivoire (reçu de Jean Marc le 15 novembre 2016 à 07h50).
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Bonjour jean-Marc,

Merci pour cette information qui fait craindre une détérioration des droits des LGBT en Côte d'Ivoire considéré plus ouvert que la majorité des pays du continent africain. Et ce n'est pas le seul signe. Savais-tu que la Côte d'ivoire a votté CONTRE la nomination d'un expert de l'ONU  sur la violence contre la communauté LGBT ? 

Dans un article récent

Protection des LGBT : le jeu trouble de la Côte d’Ivoire

le blogueur Jean Marc Yao nous livre une analyse très éclairante sur le site 76crimesfr.comJean Marc Yao est un défenseur des droits humains qui vit en Côte-d’Ivoire. Docteur en philosophie, il est spécialiste des questions relatives aux LGBTI à la Ligue Ivoirienne des Droits de l'Homme (LIDHO). Consultant en droits humains auprès d'Alternative Côte d'Ivoire (ACI) et de Lesbian Life Association Côte d'Ivoire (LLACI), Jean Marc Yao est aussi chargé des études et de la formation à l’Interafricaine pour la Promotion de la Santé et des Droits Humains (IPSDH). Voici son analyse.


La Côte d’Ivoire passe généralement pour une terre d’asile pour les LGBT. Une législation qui ne criminalise pas l’homosexualité, telle est le principal élément qui fonde cette réputation. En fait de non criminalisation, c’est en réalité un quasi-vide juridique qu’il y a dans la législation ivoirienne sur la question de l’homosexualité.

Car hormis  l’article 360 du code pénal qui fait des relations entre personnes du même sexe une situation aggravante de l’attentat à la pudeur, l’on ne rencontre nulle part d’articles relatifs aux relations et aux personnes homosexuelles. C’est dire que les personnes LGBT n’y ont pas de statut spécial. Cela signifie que la législation ivoirienne ne leur accorde aucune protection spécifique tout comme elle semble ne pas les menacer particulièrement.

Si le vide juridique relatif aux LGBT est manifeste, l’attitude de l’Etat ivoirien, elle, est floue ; à telle enseigne qu’il devient difficile de voir la réelle position de cet Etat sur la question des LGBT.  En effet, d’une part, le chef de l’Etat de Côte d’Ivoire s’est illustré positivement en ayant saisi la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDHCI) lorsque l’ONG Alternative Côte d’Ivoire avait été attaquée en janvier 2014.

Cependant, d’autre part, l’Etat dont le Président Ouattara est le chef semble s’inscrire dans une dynamique négative en ce qui concerne la protection des personnes LGBT.

Voici 2 indices inquiétant à ce propos :

  1. Au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, en septembre 2014, la Côte d’Ivoire a voté contre le projet de résolution « Droits de l’homme, orientation sexuelle et identité de genre » (A/HRC/27/L.27/Rev.1), un texte qui ne fait que s’inquiéter des violences et des discriminations dont sont victimes des personnes en raison de leur orientation sexuelle et/ou leur identité de genre.
  2. Récemment, en juin 2016, toujours au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, la Côte d’Ivoire a encore voté contre le projet de résolution « Protection contre la violence et la discrimination en raison de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre » (A/HRC/32/L.2/Rev.1 ). Pourtant, ce projet de résolution ne visait qu’à doter le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies d’un Expert indépendant pour les violences basées sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.

Il est à noter que dans ces votes, la Côte d’Ivoire s’est alignée sur la position des pays comme l’Arabie Saoudite. C’est peut-être là un signe qui ne trompe pas. A l’heure où une nouvelle constitution ivoirienne est en préparation, il y a vraiment des raisons de rester vigilant.


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