Depuis plusieurs année, l'ALGI reçoit des demandes d'aide de gais et de lesbiennes qui subissent la répression et l'ostracisme dans leur pays. Voilà pourquoi nous avons constitué le Comité de solidarité internationale afin d'appuyer la lutte des minorités sexuelles à l'étranger.
Mais, rapidement, nous avons été confrontés à une autre réalité, celle des gais, des lesbiennes et des transsexuels qui arrivent à fuir leur pays pour le Canada où ils revendiquent le statut de réfugié selon la Convention de Genève signée par le Canada. C'est ainsi que nous sommes amenés à supporter les demandeurs d'asile qui sollicitent notre aide pour défendre leur dossier.
C'est dans ces circonstances que nous avons découvert que le Canada, en particulier depuis l'adoption en 2012 de la loi C31 par le gouvernement conservateur, autorise une violation injustifiée des droits des personnes en danger (Mémoire de l’Association canadienne des libertés civiles en rapport avec le projet de loi c-31). Lire notre dossier.
C'est ainsi qu'un demandeur de refuge se retrouve en prison pendant des mois sans aucune accusation, et sans aucune décision d'un tribunal indépendant. Ce réfugié que nous accompagnons est gai. Il a fui son pays après avoir été battu par sa famille qui a découvert sa relation. La famille l'a amené en prison et voulait le marier de force à sa cousine. Il a réussi à fuir le jour de ce mariage forcé. Et c'est maintenant ici, au Canada, qu'il se retrouve en détention dans l'impossibilité de contacter ses amis en Afrique pour préparer son audience à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Voici un témoignage d'un autre africain qui a été détenu au Centre de Laval. David (nom fictif) a passé un peu plus d’un mois au Centre de surveillance de l’immigration de Laval. Source courrierlaval.com
Les premiers jours, David n’arrivait pas à manger ni même dormir dans ce centre de détention hautement surveillé et entouré de clôtures et fils de barbelé. L’arrivée dans le pays d’accueil était soudainement brutale.
Il était privé de liberté dans sa cellule pendant une grande partie de la journée. «On te réveille à 6h le matin et il faut aller manger, faim ou pas, témoigne-t-il. Même si tu ne te sens pas bien, tu dois sortir pour manger. Après, tout le monde remonte dans sa chambre. Tout ce qu’il reste à faire, c’est dormir. Tout est barré, il y a juste un accès pour la toilette. Si tu n’as pas sommeil, tu regardes le plafond et tu te mets à réfléchir jusqu’à ce qu’on rouvre les portes pour aller manger.»
Comme seule distraction dans les ères communes, une table de tennis et une télévision. «Quand on nous dit de monter, il faut tout arrêter. C’est la règle.»
Les chambres sont partagées avec quatre ou six personnes, qui ne sont jamais appelées par leur prénom, mais plutôt par leur numéro de lit. David se souvient très bien du sien, un numéro qui le marquera pour toujours.
Dès qu’il prenait trop de temps sous la douche, un garde venait l’avertir, ce qui augmentait l’impression de constante surveillance et créait une certaine paranoïa.
David était seul au pays, sans visite. «Il faut être fort mentalement», reconnaît-il.
Pendant son séjour, il a côtoyé des gens qui semblaient s’affaiblir psychologiquement. «J’ai vu des personnes qui ont commencé à avoir des problèmes psychologiques. J’ai vu des aînés en train de pleurer. Il y avait des gens qui parlaient seul à tout moment. À force de tourner en rond et réfléchir, on peut perdre la tête.»
|