Depuis le début du mois de février, il ne se passe guère de jour au Ghana sans que la question des droits des homosexuels fasse l’objet d’un débat télévisé, d’une tribune dans la presse ou d’échanges sur Twitter. A l’origine de la polémique, l’ouverture en banlieue d’Accra, le 31 janvier, des locaux de la jeune association LGBT+ Rights Ghana, créée en 2018 pour promouvoir les droits des personnes lesbiennes-gays-bisexuelles et transgenres. L’inauguration, célébrée lors d’une soirée, s’était accompagnée d’une levée de fonds pour le collectif. Les locaux devaient servir à abriter des événements associatifs et une permanence d’accueil pour la discrète communauté gay d’Accra.
Mais la parenthèse d’espoir aura duré moins d’un mois : LGBT Rights Ghana a dû mettre la clef sous la porte le 24 février. Expulsés des locaux et perquisitionnés par les forces de l’ordre, vraisemblablement sur ordre du propriétaire des lieux, les membres de l’association ont dû se disperser. Contactés par Le Monde Afrique, ces derniers ont décliné toute demande d’interview, disant craindre pour leur sécurité.
Car depuis trois semaines, la communauté LGBT est la cible d’attaques violentes dans les médias ghanéens et sur les réseaux sociaux. C’est l’avocat Moses Foh-Amoaning, porte-parole bien connu d’un puissant lobby religieux, rassemblant des chrétiens et des musulmans conservateurs, qui a ouvert les hostilités le 11 février, en appelant le gouvernement « à fermer immédiatement ce bureau et à arrêter les personnes impliquées ».
(...) « Quand j’étais au Ghana, se souvient-il, des rumeurs couraient sur ma sexualité. Je les ai toujours niées, car je savais que la vérité mettrait en danger ma carrière de journaliste et ma sécurité personnelle. Mais je veux désormais que les gens sachent que je suis à la fois un individu respectable, un journaliste de télévision et une personne homosexuelle. »
Depuis, Ignatius Annor dit avoir reçu de nombreuses menaces, mais aussi des messages de soutien et de remerciement de la part de Ghanéens vivant leur sexualité dans la clandestinité. « Cette vague d’homophobie est la pire que le pays ait connue, poursuit-il. Encouragés par les déclarations homophobes des dirigeants politiques et religieux, et par l’anonymat que procurent les réseaux sociaux, les gens désormais sont libres de menacer et d’insulter sans risque de représailles. »
(...) Malgré la polémique, Kwame Edwin Otu, professeur adjoint d’études africaines à l’Université de Virginie, et spécialiste des questions LGBT, se veut optimiste : « Si la réaction des homophobes est aussi violente, c’est parce que le Ghana est en train de changer. Avant d’envisager une décriminalisation des relations homosexuelles, il faut provoquer le débat, et c’est ce qu’a fait LGBT Rights Ghana. »
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