Pendant mes études à Paris, j’ai rejoint une association de LGBTQ chrétien.es, David et Jonathan. Et je dois dire que ce fut une rencontre extraordinaire. Nous sommes allés ensemble à Jérusalem, nous avons écrit des articles, fait des représentations auprès des député.es et rencontré des représentants religieux. David et Jonathan nous a aidés à mettre sur pied l’association Homosexuels musulmans de France qui se voulait un endroit de rencontre et de partage dans un espace sécurisé. D’ailleurs beaucoup, comme moi, se sont réconcilié.es avec leur spiritualité en la considérant comme un outil d’émancipation pour s’éloigner de tout ce qui était normatif, comme le patriarcat entre autres. La pratique spirituelle nous a conduit en 2012 à créer la première mosquée inclusive d’Europe. Curieusement, il y a beaucoup de personnes hétérosexuelles musulmanes qui viennent nous voir parce que nous présentons une réforme de l’Islam, qui déconstruit les préjugés à la fois envers les minorités sexuelles, mais aussi les femmes, les Juifs, etc., et que nous posons un autre regard sur la religion. La religion pour moi ne doit pas être dogmatique et placée entre les mains de quelques-uns qui deviennent les gardiens de ce dogme.
(...) Je dirais que le Coran ne dit absolument rien sur les relations homosexuelles et la sodomie. Je ne parlerai pas de la représentation des femmes qui est moins acceptable. Le Coran condamne le viol entre hommes comme il le condamne pour les femmes. Mais une religion de tombe pas du ciel ex nihilo; elle se construit dans un creuset social, politique et collectif particulier. Et bien évidemment, le contexte dans lequel elle est née ne correspond plus au contexte actuel. Pour le Coran et pour la Sunna, beaucoup de musulmans se rendent compte aujourd’hui que l’Islam doit évoluer et on a pu le voir avec les Printemps arabes, et la création d’associations démocratiques, féministes et LGBTQ+. Il existe donc un changement qui s’éloigne de cette minorité extrémiste radicale bruyante et surtout extrêmement dangereuse.
(...) Des historiens ont fait une recherche minutieuse de toutes les archives judiciaires de l’Empire Ottoman, le plus grand empire islamique qui a duré 7 siècles, et ils n’ont trouvé aucune condamnation pour homosexualité ou pour sodomie. Durant cette période je ne veux pas dire que tout était parfait pour les minorités sexuelles musulmanes mais il y a eu donc plus de tolérance qu’on veut bien nous le faire croire aujourd’hui, comme plus de tolérance religieuse par exemple puisqu’on retrouve dans cet empire des vizirs qui étaient juifs.
(...) Bien sûr on se rend compte que beaucoup d’occidentaux ne savent pas c’est quoi l’Islam, c’est quoi être musulmans, et parfois je me demande si les Musulmans le savent bien aussi. Cette construction de l’Islam, telle que présentée par Daesch, date seulement de la seconde moitié du XXe siècle et je la qualifie de fascisante. Et ceux qui s’en revendiquent sont extrêmement dangereux mais ne constituent qu’une infime part des Musulmans à travers le monde.