Déclaration de JohannesbourgLA DÉCLARATION DE JOHANNESBOURG SUR L’ORIENTATION SEXUELLE, L’IDENTITÉ DE GENRE ET LES DROITS HUMAINSUne réunion d’organisations africaines lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres et transsexuelles avec cinquante-cinq participants appartenant à vingt-deux associations représentant seize pays à travers le continent a adopté la déclaration suivante à Johannesbourg, Afrique du sud le 13 février 2004. Aux gouvernements africains membres des Nations Unies et membres de la Commission des Droits Humains des Nations Unies: Nous vous écrivons en tant que coalition d’organisations africaines lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres et transsexuelles. Si nous ne signons pas cette déclaration avec les noms de nos organisations, c’est à cause du climat de répression et de peur que nous rencontrons à tous les jours. Nous représentons seize pays à travers l’ensemble du continent africain. Nous nous adressons à vous en tant que confrères et consoeurs africains, voulant que notre continent se développe et atteigne son plein potentiel, gardant l’espoir pour la démocratie africaine, sachant que la répression et la peur sont incompatibles avec la paix et la liberté, conscients que la démocratie et le développement peuvent être acquis seulement en mobilisant l’énergie de tous les peuples africains. Nous vous déclarons : Nous, lesbiennes, gais, bisexuel-le-s, transgenres et transsexuel-le-s africains, nous existons — en dépit de vos efforts de dénier notre existence. Nous faisons partie de vos pays et de votre électorat. Nous regardons vos délibérations à partir de nos communautés, qui sont aussi vos communautés. Nous réclamons que nos voix soient entendues. Nous vous demandons d’appuyer une résolution devant la Commission sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et les droits humains. Partout en Afrique, nous sommes victimes d’abus de nos droits humains qui menacent notre sécurité, nos moyens d’existence, et nos vies. Le fait d’être les cibles de tels abus est preuve que nous existons ; les états ne persécutent ni les fantômes ni les spectres. C’est aussi la preuve qu’il est nécessaire d’agir pour protéger nos situations réelles et nos droits fondamentaux. Nous, les lesbiennes, gais, bisexuel-le-s, transgenres et transsexuel-le-s africains, nous sommes victimes d’harcèlement par la police, d’abus par nos voisins et nos familles, de violence et de brutalité — des fois même de viol punitif — dans les rues. Nous subissons la discrimination au travail. Certaines de nos familles nous imposent des mariages contre notre gré dans l’espoir de changer ce que nous sommes au plus profond de nous-mêmes. Certains d’entre nous, incluant les plus jeunes, sont expulsés de chez-eux à cause des préjugés et de la peur. Nos vies intimes et privées sont considérées comme criminelles. Des lois qui punissent « les actes contre nature » ou la « sodomie » sont utilisées contre nous. Des chefs politiques disent que ces lois défendent les « traditions culturelles africaines » - même si, sans exeption, ces lois ne sont que des importations étrangères, apportées par l’injustice du colonialisme. On nous refuse l’accès aux soins de santé et à l’information de base sur la santé concernant nos vies et nos besoins. Nous sommes blamés pour la propagation du VIH/SIDA (qui selon les experts est transmis en Afrique principalement par les actes sexuels hétérosexuels) et en même temps nous sommes exclus des programmes de prévention du VIH. Les contributions héroïques que nous avons faites concernant la prévention et le traitement du VIH – l’éducation dans nos propres communautés face à la négligence ou la persecution de l’état – sont écartées ou activement reprimées. Les écoles enseignent l’intolérance qui contribue à l’harcèlement qui enlève le droit fondamental à l’éducation des jeunes ayant une sexualité ou une identité de genre non-conformiste. Nous sommes les cibles des campagnes de propagande des médias qui nous traitent « d’étrangers », « d’infectés » de « malins », ou de « malades ». Les chefs politiques encouragent la haine contre nous afin de solidifier leur propre statut politique. On nous garde silencieux et on nous enlève notre droit de réplique. En même temps, nous avons et nous avons toujours eu une place en Afrique. Malgré la pression causée par les préjugés que les politiciens et chefs populistes auto-proclamés avancent, beaucoup de nos familles résistent, beaucoup de nos voisins, nos collègues de travail, nos amis continuent à nous aimer et à nous appuyer. Beaucoup de nos communautés continuent d’affirmer que nous sommes une partie intégrale de leurs réseaux sociaux. Beaucoup de cultures traditionelles sont toujours menées par les principes d’accueil et d’appartenance qui ont toujours été au centre de la vie africaine ; elles ne se laissent pas déformer par la politique de l’exclusion et elles conservent notre juste place dans la collectivité. Beaucoup de chefs religieux africains de plusieurs dénominations nous parlent de l’amour et de l’inclusion au lieu de haine et de vengeance. Et, sur notre continent, l’Afrique du Sud, après sa longue lutte de libération, est devenue le premier pays au monde à inclure, dans sa constitution post-apartheid, « l’orientation sexuelle » comme statut protégé contre la discrimination. En appuyant la résolution sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre et les droits humains, vous serez fidèles à la vraie tradition africaine qui, culture après culture, avant que le colonialisme ne jette son ombre abrutissante, a reconnu la mutualité et l’interdépendence entre nous tous. Nous vous incitons à appuyer cette résolution. Signé par les représentants de : Afrique du Sud |